Entretien avec Youcef Hemimou, expert chimique sur le P41
Quel est le point de départ du projet 41 ? Comment ce projet a-t-il été mis en place ?
Les accidents industriels majeurs impliquant des substances dangereuses ont souvent des conséquences très graves, comme en témoignent les accidents de Seveso, Bhopal, Schweizerhalle, Enschede, Toulouse ou encore Buncefield. Ils sont habituellement liés à un incendie ou une explosion d'importance majeure suivie de développements incontrôlés et ils génèrent pour la santé humaine ou pour l'environnement de graves dangers.
C'est pour veiller à ce que les mesures de précaution appropriées soient prises afin de garantir un niveau de protection élevé au sein de l'Union européenne que la directive SEVESO a été adoptée. Elle établit des règles visant d'une part à prévenir les accidents majeurs qui pourraient être causés par certaines activités industrielles, et d'autre part à en limiter les conséquences pour la santé humaine et pour l'environnement.
Pour prévenir ces risques industriels dans la façade atlantique de l’Afrique, la DG DEVCO de l’Union européenne a lancé en 2015 le projet 41 dans 8 pays de la région - Bénin, Côte d'Ivoire, Gabon, Liberia, Maroc, Sénégal, Togo et Cameroun - afin de définir le profil national de chaque pays en matière de gestion des installations à haut risque et de former les acteurs locaux à intervenir en cas d’accidents.
Comment le projet 41 aide-t-il concrètement les pays de la région à faire face à ces risques ?
Trois étapes sont essentielles à la prévention des risques industriels : préparer les acteurs publics et privés à réagir au mieux en cas d’accident, identifier les sites industriels à haut risque et analyser la réglementation.
Pour identifier les sites à haut risque, des critères de classement au regard de la directive SEVESO sont définis. Dans chacun des 8 pays, de nombreuses missions sont réalisées pour rencontrer les acteurs institutionnels et privés et visiter les sites industriels. Afin d’impliquer chaque pays dans le projet, des experts locaux sont sélectionnés pour nous aider dans ce travail d’inventaire. A l’issue de cette étape, une série de formations animées par des experts NRBC européens et africains, recrutés pour les besoins du projet, sont dispensées à des représentants de ministères, des membres de la protection civile et des industriels. L’objectif est de développer leurs capacités de gestion des risques chimiques dans la région mais aussi de prévenir les risques graves d'accidents impliquant des substances dangereuses à l'intérieur et autour de toutes les installations chimiques majeures.
L’équipe projet a également mis en place un outil sur la base d’un questionnaire élaboré à partir de la directive SEVESO permettant à chaque pays de se positionner par rapport aux réglementations internationales relatives à la gestion des installations chimiques à haut risque. Après évaluation des situations de chaque pays, des recommandations sont formulées pour les aider à définir des mesures pour améliorer la prévention liée aux accidents. Par exemple, le ministère de l’Environnement gabonais a élaboré, avec l’appui de l’INERIS, un projet de décret sur les installations classées en reprenant une partie de la directive SEVESO et les critères de classification des produits dangereux du GHS (Globally Harmonised System of Classification and Labelling of Chemicals). A l’instar du Gabon, plusieurs autres pays de la façade atlantique de l’Afrique sont en cours de modification de leur législation.
Plus d'informations sur le site des Centres d'excellence NRBC.