Rethinking Plastics : Réduire l’utilisation des déchets plastiques au Vietnam et lutter contre la pollution marine
Parallèlement au développement économique rapide qu’a connu le Vietnam ces dernières décennies, la production de déchets solides, dont les déchets plastiques, a augmenté de manière constante. Environ 730 000 tonnes de déchets plastiques sont aujourd’hui déversées dans la mer chaque année, et près de 50 % des produits en plastique sont conçus pour un usage unique et ensuite jetés.
Le cas des sacs en plastique est particulièrement criant. Selon le ministère vietnamien des Ressources naturelles et de l’Environnement, environ 31,4 milliards de sacs en plastique sont transformés en déchets chaque année. Seulement 17 % sont réutilisés et recyclés. En l’absence de systèmes de gestion des déchets appropriés, ce type de plastique à usage unique finit rapidement dans les décharges ou dans l’environnement.
En parallèle, dans les villes, le pourcentage de déchets plastiques parmi les déchets solides est en augmentation. Cela s’explique par une évaluation rapide des habitudes de consommation des Vietnamiens : la consommation de plastique par habitant est passée de 3,8 à 41,3 kilogrammes par habitant de 1990 à 2018.
Pour répondre à cette problématique, la gestion des déchets au travers d’une économie circulaire, et la promotion d’une économie bleue pour la conservation des milieux marins, ont été les deux principaux axes de ce projet grâce à des interventions multiples :
- Des activités de conseil stratégiques, des dialogues de politiques publiques et des échanges de connaissances
- Des projets pilotes sur la collecte, le tri et le recyclage des emballages, la gestion des déchets des navires, la pêche aux déchets mais aussi avec les commerçants et les supermarchés
En savoir plus sur le site du projet
Des résultats encourageants sur la gestion des déchets et la mise en place des filières de responsabilité élargie des producteurs (REP)
En appui auprès du Ministère de l’Environnement et des Ressources Naturelles (MONRE), le projet « Rethinking Plastics » a contribué à l’élaboration du cadre juridique (décret 08/ND-CD du 10/01/2022) intégrant des dispositions sur la responsabilité élargie des producteurs (REP), en complément de la Loi sur la Protection de l'Environnement (LEP) amendée en 2020. La REP sera obligatoire pour 6 secteurs, dont celui des emballages à partir de 2023. Une boîte à outils pour l'opérationnalisation du principe de la REP, traduite en vietnamien, la formation de 70 experts ainsi qu’une étude sur le rôle du secteur informel et son intégration à la REP ont contribué à développer les connaissances sur cet instrument de politique environnementale et promouvoir l’économie circulaire.
Un manuel pour les entreprises de recyclage du plastique et une étude de faisabilité sur les normes et les écolabels pour les produits contenant du plastique recyclé ont été réalisés pour soutenir le plan d'action sur la consommation et la production durables (décision 889/QD-TTg du 24 juin 2020) du Ministère de l’Industrie et du Commerce. Par ailleurs, le projet pilote menée par l’Institut de recherche pour le développement (IRD) à Ho Chi Minh-ville (HCMV) a permis d’analyser plus finement les enjeux institutionnels, techniques et socio-économiques de la mise en œuvre des REP au sein des municipalités vietnamiennes.
Des solutions pour améliorer le taux de collecte, le tri à la source, la traçabilité et l’intégration du secteur informel ont été proposées aux partenaires nationaux et locaux pour réduire la pollution plastique.
L’ensemble de ces activités de concertation auprès d’acteurs multiples aux intérêts variés a induit un dialogue permanent pour pallier les freins rencontrés auprès des autorités publiques en charge de la gestion environnementale et des acteurs économiques du secteur du plastique et du recyclage.
« Combiner les centres d’intérêt de chacun et inscrire notre action dans leurs missions a été rendu possible par le dialogue et la présentation de résultats, d’outils, de connaissances et de solutions concrètes, par ailleurs adaptées au contexte local. »
Néanmoins, le partage d’expériences (réglementation et modèles REP) de l’UE a permis de démontrer l’opérationnalité et les résultats des REP en matière d’amélioration de la gestion des déchets et la réduction de la pollution plastique in fine. La création d’une plateforme REP nationale au sein du Ministère de l’Environnement et des Ressources Naturelles vietnamien (MONRE) a permis de présenter et de partager l’expertise française et plus largement européenne sur ce sujet émergent et de mutualiser les actions des différents partenaires internationaux.
« La plateforme a associé très en amont les industriels qui seront soumis à la REP intégrant ainsi de manière plus réaliste les difficultés techniques et financières de la mise en œuvre et permettant de construire un cadre légal plus opérationnel. »
Les perspectives d’amélioration et d’approfondissement du travail mené sur l’axe de la gestion des déchets sont multiples. La structuration et la gouvernance des filières REP via la création du bureau national REP, la conception et la mise en place du portail national et la consolidation d’une feuille de route pour les 3 ans à venir font notamment partie des prochaines étapes.
« L’un des enjeux majeurs est d’associer et de fédérer les autres ministères, les collectivités locales, les opérateurs (collecte, tri et recyclage) ainsi que les acteurs économiques afin d’organiser la REP de manière transparente et efficace. Sans oublier la mobilisation des consommateurs pour intégrer de nouvelles pratiques. »
Vers la valorisation et le renforcement d’une économie bleue, respectueuse des écosystèmes marins
Au Vietnam, le projet pilote "Gestion des déchets de navires dans les ports vietnamiens", au terminal de Cat Lai (Saigon NewPort, Ho Chi Minh ville), vise, sur le volet du développement durable au niveau des mers et des océans, à réduire le déversement illégal en mer de déchets de navires.
En ce sens, le développement d'un système efficace de notification en ligne obligatoire des déchets par les navires (type et volume de déchets), les réflexions sur un système de recouvrement des coûts incitatifs (taxe sur les déchets) et le développement d’un manuel de procédures (Manuel de gestion des déchets des navires, SWMM) visent à délivrer des services efficaces de traitement des déchets aux navires et faciliter les procédures administratives pour les agents maritimes.
Le projet pilote « Fishing for Litter », déployé à Phu Yen a permis d’engager près de 40 bateaux de pêche volontaires dans la collecte et le tri des déchets marins dans une perspective de transition vers une économie circulaire.
« Des procédures et méthodologies de tri, d’audit et de revente des déchets (20% des déchets collectés) ont permis de démontrer les avancées en matière de sensibilisation et de capacité et de poser de nouvelles questions sur les modèles économiques viables. »
Des évolutions et des projets d’extension aux échelles régionale et nationale sont à la manœuvre.
« Fort du partenariat de qualité développé avec Vinamarine (Vietnam Maritime Administration) et les perspectives de réplicabilité des activités pilotes à l’échelle nationale, un projet de coopération régionale au sein de l’ASEAN sur la gestion des déchets dans les ports se dessine. Financée par l’AFD, une étude de faisabilité va permettre d’ici la fin 2022 de définir une stratégie régionale de gestion des déchets produits par les navires conduisant à des systèmes de gestion des déchets harmonisés et efficaces pour les pays membres de l'ASEAN. »
Les actions entreprises au Vietnam ont la particularité d’avoir été menées conjointement avec la GIZ, l’agence de coopération allemande, qui a mis en œuvre en parallèle des projets similaires dans d’autres pays de la région d’Asie du Sud-Est. La collaboration entre agences, inscrite au cœur de l’approche « Team Europe », se veut bénéfique au regard des missions implémentées sur le terrain, et ouvre la voie à un travail conjoint d’autant plus efficace à l’avenir dans les pays d’intervention.
« La collaboration avec la GIZ a été très enrichissante tant techniquement qu’humainement, notamment durant la période COVID. Nous avons pu articuler nos compétences, nos réseaux et accompagner nos partenaires de manière complémentaire au sein d’une réelle Team Europe tout au long du projet. L’appui de la Délégation de l’Union Européenne au Vietnam et son implication sur le terrain ont également permis de créer une réelle confiance avec nos partenaires institutionnels et techniques. A ce titre, ce projet est également exemplaire. »