Biodiversité : sortir du « business as usual » pour un accord ambitieux à la COP 15 en Chine

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A l’heure même où « des jeunes marchent à travers le monde dans un appel pour sauver la planète », Didier Babin, responsable du projet « Post 2020 Biodiversity Framework. EUSupport » mis en œuvre par Expertise France, a accueilli à l’Unesco des représentants de plusieurs organisations pour ensemble se mobiliser pour un nouveau pacte mondial entre l’Homme et la Nature.

« Depuis 40 ans, plus de 60% du vivant sauvage a disparu de la planète », a rappelé Pascal Canfin, alors directeur général du WWF France. Les évaluations scientifiques montrent que la dégradation de la biodiversité augmente, et que les pressions qui la menacent – surtout d’origine humaine – ne diminuent pas. Or « nos systèmes socio-économiques et culturels, moyens de subsistance et qualité de vie en sont tributaires », a expliqué Xing Qu, directeur adjoint de l’Unesco.

Prenant conscience de cette menace, 196 États ont adopté la Convention sur la diversité biologique (CDB) lors du sommet de Rio en 1992. Depuis, tous les deux ans, la communauté internationale se réunit lors d’une conférence des parties (COP) pour suivre les engagements pris pour atteindre les objectifs fixés dans la convention. Prochaine échéance : la COP15, qui aura lieu en Chine en octobre 2020.

Afin de contribuer à l’élaboration d’un accord ambitieux et transformatif fin 2020, le Rendez-vous de l’Expertise du 15 février dernier a réuni un panel de haut niveau sur une question centrale : à quelles conditions la COP15 sur la biodiversité pourra-t-elle être un succès ?
 

Créer un momentum impliquant tous les acteurs

Une première priorité d’ici octobre 2020 : faire monter le thème biodiversité sur le devant de la scène, comme cela a été fait pour le climat. Un long processus de négociations vient de démarrer en vue de la COP 15. De nombreuses étapes intermédiaires sont prévues – à commencer par la 7ème réunion plénière de l’IPBES, le « GIEC de la biodiversité », du 29 avril au 4 mai 2019 à l’Unesco, à Paris.

Scientifiques, ONG de tous secteurs, communautés locales et peuples autochtones… Tous ont un rôle à jouer pour mobiliser largement les Etats, les villes et autorités sub-nationales, les entreprises et les acteurs financiers et que tous s’engagent en 2020. « Nous avons besoin de tous », souligne Jérémie Pellet, directeur général d’Expertise France.

Définir des feuilles de route précises

En 2010, la conférence de Nagoya a représenté un progrès majeur : un changement de paradigme consistant à intégrer les questions de biodiversité dans les pratiques économiques et techniques. Pourtant, ses effets concrets ont été limités, et presque aucun des objectifs d’Aïchi pour la biodiversité fixés en 2010 ne sera atteint.

Pour faire bouger les choses, il importe d’« aller plus loin que les conventions elles-mêmes », estime Laurence Tubiana, directrice de la Fondation européenne pour le climat (ECF) et ex-ambassadrice française pour le climat. Tous les acteurs concernés doivent non seulement se mettre d’accord sur des objectifs concrets, chiffrés et datés, mais aussi définir des méthodologies communes et des feuilles de route précises adaptées aux responsabilités et capacités de chacun.

Mobiliser le secteur privé et financier

Enfin, cela suppose de nouveaux investissements car les ressources publiques mobilisées sont inférieures aux besoins. « Il faut aller chercher dans l’économie pour trouver les 200 ou 300 milliards qui manqueraient pour atteindre Aïchi », explique Gilles Kleitz, directeur du département Transition écologique et ressources naturelles à l’Agence française de développement (AFD). Cela pose la question des banques responsables et de la création d’une économie « pro-nature » – ce à quoi travaille l’AFD avec d’autres banques de développement au sein de l’International Development Finance Club (IDFC).

Le secteur privé a donc aussi sa pierre à apporter. « Les entreprises sont un moteur d’innovation et de solutions concrètes », ajoute Bertrand Bonhomme, directeur Développement durable du groupe Michelin. L’initiative Act4Nature a par exemple permis de réunir des entreprises de taille, niveaux et connaissances différents qui se sont engagées sur 10 critères partagés.

 

« Le business as usual n’est plus possible », synthétise Stefan Leiner, de la DG Environnement de la Commission européenne. L’Union européenne, qui est mobilisée dans la préparation de la COP15 avec l’appui du projet mis en œuvre par Expertise France, appelle l’ensemble des acteurs à s’impliquer pour construire un accord ambitieux et transformatif pour préserver la biodiversité mondiale. Sans hésiter à « parler au cœur des gens », conclut Yann Wehrling, ambassadeur français délégué à l’environnement, rappelant que l’extinction des grands singes pourrait être prévue de notre vivant.

 

Cette table-ronde a été co-organisée par l’Union européenne, l’Unesco, Expertise France et EPE (Entreprises pour l’Environnement) en partenariat avec Act4Nature, AFD, AFB, CNRS, FRB, Humanité et Biodiversité, IDDRI, IRD, MAB Programme sur l’Homme et la Biosphère, NNHN, Orée, Plateforme de l’Initiative Française pour les Entreprises et la Biodiversité, Comité Français de l’UICN et WWF.  Elle a rassemblé environ 250 personnes, y compris des représentants de nombreuses délégations permanentes auprès de l’Unesco.

 

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