Rwanda : la coordination de l'expertise technique européenne au service de l'accès aux médicaments

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Afin de renforcer et opérationnaliser l’agence nationale de réglementation pharmaceutique rwandaise, Expertise France mobilise de l’expertise française et européenne dans le cadre d’un projet financé par l’Union européenne

Renforcer et opérationnaliser l’autorité de réglementation des médicaments au Rwanda est un enjeu clé afin de pérenniser le marché pharmaceutique et d’améliorer la sécurité sanitaire sur le continent africain. Pour répondre à ce besoin, l’Europe mobilise de l’expertise dans le cadre d’un projet de jumelage financé par l’Union européenne et mis en œuvre par Expertise France

Expertise France, en jouant son rôle d’ensemblier de l’expertise européenne, aidera ses partenaires rwandais à satisfaire aux exigences minimales de l’OMS concernant une surveillance réglementaire efficace de la production locale de produits de santé de qualité, sûrs et abordables, en incluant les vaccins. L’apport d’expertise auprès de la RFDA devrait également permettre de faire effet de levier dans le contexte sanitaire actuel, dynamique sur la réglementation pharmaceutique en Afrique, et encourager la collaboration et le partage d’expertise technique entre l’Agence européenne des médicaments (EMA) et l’Agence Africaine du Médicament (AMA) dont le siège se situe également au Rwanda.

Ce jumelage, une première pour Expertise France au Rwanda, s’inscrit dans la continuité du rapprochement diplomatique entre la France et le Rwanda depuis 2019 et dans le cadre du renforcement de la présence d’Expertise France et du Groupe AFD dans le pays. Le retour de l’AFD au Rwanda sur des projets en prêts souverain et subventions en 2019 s’est en effet également traduit par l’octroi d’un premier projet emblématique pour Expertise France dans le secteur de la formation professionnelle. En étroite collaboration avec l’AFD et l’Union Européenne, l’agence a vocation à continuer à soutenir la stratégie de développement du Rwanda à l’avenir.

Dans cet entretien, Valérie Denux, directrice Europe et Innovation de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), nous explique les enjeux autour de l’accès au médicament en Afrique et le rôle joué par l’ANSM dans ce projet.

 

 

 

Pouvez-vous nous rappeler l’ambition de ce projet et les enjeux pour le Rwanda ?

Ce projet vise à faire monter en puissance la capacité de l’agence de réglementation pharmaceutique rwandaise, en travaillant sur le cadre, les procédures et les principales fonctions réglementaires liées aux médicaments, afin de faciliter l’importation mais aussi, la production sur place et l’utilisation des produits de santé sur leur territoire.

S’inscrivant dans une démarche globale entreprise par le Rwanda pour améliorer son secteur de la santé, ce projet devrait permettre à l’agence de régulation rwandaise, encore jeune et qui nécessite de pouvoir être renforcée, d’être accréditée par l’OMS et reconnue en tant qu’autorité de réglementation à part entière.

Cela représente un enjeu très important pour le Rwanda qui pourra alors accueillir des producteurs sur son territoire, et procéder à la validation des produits médicaux issus de la production nationale grâce au cadre réglementaire et aux actions de contrôle des produits importés qui seront mises en place.

Ce projet de jumelage devrait donc conduire à un renforcement de l’accès aux produits de santé sécurisés pour les patients rwandais et des pays partenaires du Rwanda.

 

Pourquoi la France a-t-elle fait appel aux partenaires européens pour mettre en œuvre ce projet ?

Dans la mesure où ce projet de jumelage est financé par la Commission européenne, la possibilité de constituer un consortium est une chance car cela permet à la fois de diversifier les expériences et de capitaliser sur les expertises particulières de chacun.

Cela permet aussi de partager le poids de la charge de travail et des ressources humaines de chaque agence. L’Allemagne, la Belgique et la Lituanie sont aussi des contributeurs importants dans ce projet. De plus des pays comme la Suède, l’Autriche et la Grèce apportent leur contribution. Cette approche structurelle plurielle et complémentaire permet donc d’augmenter la force d’action et de proposer une offre d’expertise technique cohérente et de haut niveau en matière de réglementation des produits de santé, afin de répondre de manière plus efficace aux attentes du Rwanda.

Les différentes expertises et expériences des membres de ce consortium seront non seulement profitables à l’agence rwandaise, mais également aux agences européennes qui le composent et qui trouveront là une opportunité de mieux se connaître et de partager des bonnes pratiques.

 

Pouvez-vous nous détailler l’offre d’expertise technique que propose le consortium ?

Le consortium est un cadre de coopération qui est une force d’action importante car c’est en utilisant le vivier de tous nos experts réunis que nous répondrons aux besoins de l’agence rwandaise.

Le champ de leurs demandes est large telles que le cadrage règlementaire, les stratégies managériales, les procédures pour les essais cliniques, pour les autorisations de mise sur le marché, l’inspection, le contrôle, la pharmacovigilance, la coopération régionale, etc.

 

Plus spécifiquement, quel sera le rôle de l’ANSM dans ce projet ?

Ce projet s’articule autour de trois composantes et c’est la France qui pilote la première. L’ANSM sera donc en lead sur cette composante, avec l’appui de la HAS, et le soutien de l’Allemagne (BfArM) et de la Lituanie (SMCA). Cette première composante est essentielle puisqu’elle concerne la structuration et l’organisation de l’agence rwandaise, et cela conditionne la manière dont nous allons procéder pour mettre en œuvre l’ensemble du projet. Il y a dans cette composante sept sous-actions.

Il y a dans cette démarche de structuration un travail de transmission, même si notre législation européenne n’est pas transposable au contexte rwandais de manière complète. Nous allons revenir sur les fondamentaux de notre réglementation et dialoguer avec le Rwanda pour voir comment adapter et implémenter ces principes de base à leur règlementation nationale.

Il est aussi nécessaire de travailler sur la planification, la stratégie et l’organisation, afin de pérenniser le marché pharmaceutique et de développer la capacité de l’agence rwandaise à mieux faire face aux contextes de crises sanitaires.

Enfin, plusieurs sujets essentiels seront abordés comme les autorisations de mise sur le marché, le développement des produits, l’inspection, l’importation des produits et leur distribution. Il est à noter aussi que la France participe en soutien aux deux autres composantes plus focalisées sur la pharmacovigilance et la libération des lots de vaccins.

 

Quelles seront les prochaines étapes de mise en œuvre du projet ?

Le plan d’actions reste à construire car il faut être à l’écoute de ce que le Rwanda souhaite. Il s’agit bien de répondre à leurs attentes et de faire des propositions.

Nous allons mener avec eux une première analyse de ce qu’ils souhaitent faire, de leur niveau de maturité dans les différents sujets, et une fois que nous aurons effectué ce diagnostic, nous pourrons leur proposer différentes options de mise en œuvre.

Notre objectif est de collaborer au maximum avec nos collègues rwandais pour mettre en place des activités durables afin que les impacts de ce projet soient pérennes.

Consolider leur Agence nationale est d’autant plus important que le Rwanda a été élu par les pays africains pour mettre en place sur son territoire l’agence africaine du médicament. Ce sera probablement l’objet d’un nouvel accompagnement par l’Europe et un rapprochement avec l’Agence européenne du médicament.

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