« Créer des ponts entre les Comores et la diaspora en France »

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Comoros

À l’occasion du Sommet de la Francophonie des 4 et 5 octobre, Expertise France met en lumière les diasporas qui entreprennent dans l’espace francophone. Ainsi, Expertise France soutient des projets comme celui de Mariam Testard, membre de la diaspora des Comores. Cette franco-comorienne de 39 ans a lancé Ushesa, une plateforme de mise en relation entre des professionnels des services à la personne aux Comores et des membres de la diaspora. Elle revient sur son parcours, son projet entrepreneurial et ses défis, ainsi que sur l’accompagnement du groupe AFD dont elle a bénéficié.

Quel est votre parcours ?

Après un master en ressources humaines, j’ai notamment été cheffe de projet formation dans plusieurs grands groupes. En parallèle, je suis une serial entrepreneuse : j’ai lancé une entreprise de wedding planning, j’ai créé l’association The Good Choice qui lutte contre le décrochage scolaire et j’ai fondé Ushesa, mon projet de cœur. C’est une plateforme qui met en relation des professionnels des services à la personne, aux Comores, ou dans les îles de l’océan Indien, avec les membres de la diaspora en France ou en Europe.

Qu’est-ce qui vous incite à entreprendre ?

Tous ces projets naissent et font vivre les valeurs qui m’animent. Je souhaite que les personnes croient en leur capacité d’agir sur leur propre vie et de construire des projets pour et avec les autres. C’est mon leitmotiv, comme avec Ushesa qui répond à un réel besoin.

Pourquoi avez-vous choisi de vous installer aux Comores ?

En effet, mon engagement entrepreneurial prend aujourd’hui une dimension familiale avec notre déménagement aux Comores. C’est un retour aux sources né de ma volonté de créer des ponts entre les Comores et la diaspora en France. Mes parents sont arrivés dans les années 1980 en France où je suis née. J’ai grandi avec un ancrage profond dans la culture comorienne. Aujourd’hui, j’ai envie de participer à l’essor économique de ce pays, de bâtir et d’entreprendre dans l’archipel avec lequel j’ai des liens très forts et qui a vu naître mes parents.

Pouvez-vous nous parler davantage d’Ushesa ?

J’ai imaginé ce projet à partir de notre propre vécu : mon grand-père, qui vivait aux Comores, est décédé à cause de complications dues à une blessure au pied. Avec un véritable service de soins à la personne, les choses auraient pu se passer différemment. Cela m’a fait l’effet d’un électrochoc et j’ai mis sur pied Ushesa qui signifie « être au chevet de quelqu’un jour et nuit » en swahili. Cette plateforme facilite les mises en relation entre les membres de la diaspora et les professionnels des soins à la personne, fluidifie les transactions financières pour le paiement à distance des services et s’assure que nos clients ont accès aux meilleures prestations, via la formation des professionnelles comoriennes. C’est aussi la traduction de mon engagement féministe. Ces métiers du soin sont essentiellement assurés par des femmes et mon objectif est d’assurer leur montée en compétences et leur émancipation, à travers la professionnalisation.

Quels sont les défis et les opportunités que vous rencontrez dans le déploiement de ce projet ?

Le défi, pour le moment, est celui de l’éloignement géographique, mais ce sera bientôt du passé ! Être présente sur place est essentiel pour le déploiement du projet en 2025. Même si je suis d’origine comorienne, de loin, on ne saisit pas tous les contours du contexte économique, social et culturel. Il existe également des questions relatives à la mise au travail pour lesquelles les pratiques ne sont pas les mêmes. Mais ces défis se relèvent si l’on est bien entouré ! Je fais par exemple partie du réseau Komlink qui rassemble des entrepreneurs originaires des Comores et crée ainsi des synergies. Je capitalise aussi sur mon expérience de cheffe de projet pour élaborer et déployer des dispositifs de formation dès l’an prochain.

Comment Expertise France vous a-t-elle soutenue dans le cadre de son soutien aux diasporas entrepreneuriales comoriennes ?

L’expérience d’Expertise France en matière de création d’entreprise et l’opportunité qui m’a été offerte d’intégrer l’incubateur de Kedge Business School sont des atouts majeurs. J’ai pu ainsi structurer mon projet d’entreprise et affûter mon business plan. La force de ce dispositif réside également dans le fait qu’il met en relation tous les entrepreneurs de projets aux Comores soutenus par Expertise France. Ce partage d’expériences est une grande richesse, une source d’inspiration aussi.

Selon vous, quel rôle peut jouer la diaspora dans le soutien au développement du secteur privé aux Comores ?

La diaspora apporte avant tout un important soutien financier. Désormais, l’enjeu est de faire différemment en essayant de favoriser l’autonomisation des personnes, qu’elles puissent créer leur propre valeur. En m’installant dans le pays, j’ai envie de faire passer ce message : il est possible de se lancer aux Comores, de croire en ses idées et de les faire vivre. L’entrepreneuriat – notamment de la diaspora –, c’est une chance à saisir pour l’archipel !

Quel lien faites-vous entre diaspora et Francophonie ?

C’est mon identité de tous les jours. La Francophonie m’évoque un partage d’identité ; ce n’est pas seulement une langue en commun. La diaspora, c’est de me sentir totalement française et comorienne, sans avoir à choisir.

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